23/08/2012
- Air intérieur
Suite au constat de dépassements de la valeur repère de 30 µg/m3 de formaldéhyde, Air Pays de la Loire a réalisé un diagnostic des sources dans ces établissements. Il ressort que le bâti (plafond, murs et sols) et parfois le mobilier ou les éléments de décoration sont les plus émetteurs. Des préconisations d’amélioration de la qualité de l’air intérieur sont proposées aux gestionnaires.
contexte : formaldéhyde : polluant classé prioritaire par l’Anses
Le formaldéhyde est classé depuis 2004 dans le groupe 1 - cancérigènes certains pour l’homme par le Centre International de Recherche sur le Cancer. Ce polluant a été classé par l’Observatoire de Qualité de l’Air Intérieur (OQAI) et l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) comme devant faire l’objet d’une surveillance prioritaire.
Lors d’études sur la qualité de l’air intérieur menées entre 2008 et 2011 par Air Pays de la Loire dans des établissements scolaires de la région, il a été enregistré des niveaux moyens en formaldéhyde dépassant la valeur cible de 10 µg/m3 et parfois même la valeur repère de 30 µg/m3 proposée par le Haut Conseil en Santé Publique, impliquant donc la présence de sources d’émission majeures à l’intérieur des bâtiments.
Compte tenu de certains niveaux de formaldéhyde mesurés (jusqu’à 42 µg/m3) et en vue d’apporter des éléments d’expertise complémentaires, notamment dans le cadre de la campagne pilote nationale 2009-2011 portant sur 300 écoles et crèches en France, Air Pays de la Loire a mené en 2011 une étude exploratoire relative à la quantification des émissions de formaldéhyde issues du mobilier et des produits de construction et de décoration. Cette étude a été menée avec le soutien financier de l’Agence régionale de santé (ARS) et dans le cadre d’un partenariat avec le Département Chimie et Environnement de l’Ecole des Mines de Douai (étude du Laboratoire Central de Surveillance de la Qualité de l’Air).
objectifs : quantifier les émissions de formaldéhyde dans 3 établissements scolaires
Les objectifs de l’étude sont de quantifier les émissions des sources intérieures de formaldéhyde dans 3 établissements (6 classes) par :
- L’identification des sources intérieures de formaldéhyde, leur hiérarchisation et l’évaluation de la part attribuable de chacune de ces sources aux concentrations intérieures observées ;
- L’estimation des concentrations intérieures en formaldéhyde à partir des données collectées sur les taux d’émission des matériaux dans 3 salles de classe à l’aide d’un modèle « simplifié » ;
- Et in fine, la production d’éléments d’expertise et d’aide à la décision des gestionnaires de ces établissements en vue de réduire l’exposition aérienne des enfants au formaldéhyde.
moyens : des prélèvements passifs sur les matériaux émetteurs pour la mesure des taux d’émission
La campagne de mesure a été réalisée dans trois établissements pour lesquels il a été établi par Air Pays de la Loire un dépassement systématique de la valeur guide cible de 10 µg/m3 et pour lesquels les niveaux approchent ou franchissent la valeur repère proposée par le Haut Conseil en Santé Publique (30 µg/m3) :
- le lycée Clemenceau à Nantes ;
- l’école primaire Casanova de Donges ;
- l’école maternelle Molière à Cholet.
Des travaux exploratoires menés par le Département Chimie et Environnement de l’Ecole des Mines de Douai (EMD) ont permis de développer et valider un échantillonneur passif spécifiquement adapté à la mesure in situ des taux d’émission en formaldéhyde des surfaces et matériaux en environnements intérieurs. Air Pays de la Loire a bénéficié du soutien de l’EMD et cette technique de mesure a été déployée dans 6 classes de 3 établissements scolaires.
La mesure des émissions en formaldéhyde a été réalisée grâce à des échantillonneurs passifs (photos) constitués d’une boite de pétri en verre au fond de laquelle est placé un filtre de piégeage du formaldéhyde.
Dans chaque pièce étudiée, une quinzaine d’échantillonneurs passifs a été répartie sur l’ensemble des surfaces (plafond, sol et murs) et des pièces d’ameublement de manière à déterminer leur taux d’émission en formaldéhyde. Après une exposition de 6 heures, ils sont fermés avec une capsule et conservés au congélateur avant d’être analysés en laboratoire.
des prélèvements actifs de concentrations en formaldéhyde dans les environnements intérieurs
Parallèlement, des prélèvements actifs sur cartouches de DNPH ont été réalisés afin de mesurer les concentrations en formaldéhyde à l’intérieur de certaines pièces des établissements et à l’extérieur de l’école pendant une durée de 6 heures.
Une détermination du taux de renouvellement de l’air a été menée dans une salle de classe à Donges dans le but de réaliser une étude spécifique de modélisation en collaboration avec l’école des Mines de Douai.
résultats : des émissions par les plafonds et faux-plafonds plus importantes
La mesure des émissions en formaldéhyde de l’ensemble des matériaux présents dans les salles a permis de quantifier et de hiérarchiser précisément les sources internes de polluants en mettant en évidence les matériaux les plus émetteurs.
surfaces les plus contributrices
Les résultats des mesures par échantillonnage passif réalisées dans les différents établissements scolaires indiquent des taux d’émission des surfaces compris entre 0 et 93,3 µg/(m2.h).
Un bilan quantifié des émissions et une hiérarchisation des sources intérieures permettent de constater que les plafonds et faux-plafonds sont les sources les plus émettrices en formaldéhyde de par leur surface importante, puis ce sont les éléments du bâti (murs, sols) et certains types de mobiliers (mélaminé, contre-plaqués). Voici ci-dessous un exemple de résultats enregistrés dans une classe de l’école de Cholet, dans lequel le plafond apparaît le plus émetteur mais les deux meubles de rangement sont également fortement contributeurs en raison de taux d’émission élevés.
contributions relatives des surfaces
Concernant les contributions relatives de chaque source, en moyenne à l’échelle des 6 classes étudiées, les plafonds et faux plafonds sont en général les plus contributeurs avec une contribution allant de 23 à 35 %, en raison de taux d’émission non négligeables mais aussi parce que les surfaces concernées sont importantes et sont pour la majorité composées de fibres de verres contenant des liants à base de formaldéhyde. Le reste des contributions provient des murs, des sols, du mobilier et des éléments de décoration ou d’aménagement.
- Murs = 9 à 30 % ;
- Sols = 3 à 17 % ;
- Mobilier, aménagements = 29 à 60 %
Selon les établissements, entre 40 % et 64 % des émissions en formaldéhyde proviennent des éléments du bâti (plafond, murs et sol). Les autres émissions ont pour origine le mobilier (tables, chaises, armoires, etc.), les menuiseries (fenêtres, portes, plinthes, etc.) et éléments de décoration ou d’aménagement (tableaux, etc.).
Cette hiérarchisation des sources à l’origine de la contamination au formaldéhyde dans les établissements scolaires s’avère être une base d’informations précieuse pour les gestionnaires d’établissements. En effet, les résultats de cette étude ont vocation à permettre la définition d’actions visant à réduire les niveaux de concentration en formaldéhyde dans les bâtiments par le remplacement ou le retrait des éléments présentant les contributions les plus élevées.
étude de modélisation réalisée dans 3 salles
Une étude de modélisation a été réalisée avec application du modèle d’équilibre de masses pour 3 salles : la classe 1 de Donges, la classe 3 de Cholet et la classe 5 du lycée de Nantes. Ce modèle a pour but de tester différents scénarios d’amélioration de la qualité de l’air et d’en évaluer leurs impacts.
Différents scénarios ont été étudiés afin d’abaisser les niveaux de concentration en formaldéhyde dans les environnements intérieurs :
- une augmentation du taux de renouvellement de l’air à 1 h-1 (taux habituel correspondant à une école équipée de VMC) ;
- une suppression ou un remplacement de la source d’émission principale;
- une combinaison des deux scénarios ci-dessus.
Les résultats sont présentés sans les sources les plus contributrices pour les 3 salles (plafond ou faux-plafond).
Cette étude de modélisation montre que l’application conjointe des 2 scénarios « augmentation du renouvellement d’air » et « enlèvement de la source principale » permet d’obtenir un abattement allant jusqu’à 80 % des concentrations par rapport à la concentration initiale pour la classe de Donges (47 et 45 % pour les autres salles) ce qui apparaît donc comme le scénario le plus efficace pour abaisser les niveaux de formaldéhyde dans les salles des établissements scolaires.
conclusions et perspectives : une réponse aux attentes des gestionnaires d’ERP
L’étude a permis d’identifier les matériaux les plus émetteurs en formaldéhyde présents dans les établissements scolaires. Un bilan quantifié des émissions permet de mettre en évidence les plafonds et faux-plafonds comme sources les plus émettrices en formaldéhyde dans les 3 établissements instrumentés. Les surfaces concernées sont importantes et les matériaux sont généralement composés de fibres de verres contenant des liants à base de formaldéhyde. Selon les établissements, entre 40 % et 64 % des émissions en formaldéhyde proviennent des éléments du bâti (plafond, murs et sol), le reste des émissions provenant du mobilier, des menuiseries et des éléments de décoration ou d’aménagement.
Une étude de modélisation a montré que l’application d’un scénario combinant la suppression de l’émetteur le plus important (ou remplacement par un matériau moins émetteur) et une aération plus importante (de 0,12 h-1. à 1h-1) permet d’obtenir l’abattement le plus important (jusqu’à 80 %) par rapport à la concentration initiale en formaldéhyde pour l’école de Donges (47 % et 45 % à Cholet et Nantes).
Cette identification des sources à l’origine de la contamination en formaldéhyde dans les établissements scolaires est une base d’informations précieuse pour les gestionnaires des établissements. En effet, les résultats de cette étude ont vocation à permettre la définition d’actions visant à réduire les niveaux de concentration en formaldéhyde. Pour les 3 établissements, des préconisations précises concernant l’enlèvement de certains mobiliers ou le remplacement de certains matériaux par des matériaux moins émissifs sont proposées dans ce rapport.
Outre des travaux conséquents visant la substitution d’éléments du bâti par des matériaux moins émissifs, travaux à prévoir dans le cadre de rénovations, il s’avère que dans certains cas, le retrait de certains éléments du mobilier ou de décoration peut être une mesure simple et efficace.
La mise en place de l’étiquetage réglementaire des émissions de composés volatils des produits de construction et de décoration associés aux labels et aux Fiches de Déclaration Environnementale et Sanitaire (FDES) des produits, sont des outils efficaces de choix de produits faiblement émissifs.
perspectives
Pour répondre au besoin croissant de quantification des sources de polluant in situ, la technique utilisée est un moyen efficace pour identifier les sources de formaldéhyde.
Par la double approche modélisation-mesure réalisée, Air Pays de la Loire a ainsi développé une nouvelle capacité d’expertise et la mettra à disposition de ses partenaires dès lors que des situations de fortes concentrations en formaldéhyde seront détectées dans les ERP, en particulier les établissements d’enseignement et d’accueil de la petite enfance.
Parallèlement, Air Pays de la Loire poursuit sa veille métrologique sur de nouvelles méthodes de mesure des émissions in situ.