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Évaluation de l'impact de la combustion de biomasse sur la qualité de l'air, campagne 2013-2014

  • Air extérieur

Cette étude, réalisée en période hivernale 2013-2014, a été écourtée en raison de conditions météorologiques peu favorables à l’accumulation et aux émissions de particules dans l’air. Lors de cette période et dans ces conditions, les résultats obtenus ne mettent pas en évidence d’influence particulière des émissions de la chaufferie sur les teneurs en PM2,5 et PM10 mesurées dans son environnement.

contexte : la combustion de biomasse, une énergie en développement

En 2011, 14 % de la production énergétique française métropolitaine (électriques et thermiques) provient d’énergies renouvelables. Près de la moitié est issue de biomasse solide (bois-énergie…) dont 80 % sont dédiés à la production de chaleur.
Selon le Grenelle de l’Environnement, d’ici 2020, 23 % des besoins énergétiques français devront être assurés par des énergies renouvelables. Pour remplir cet objectif, la France projette d’augmenter la contribution de biomasse solide (de 5,9 % en 2011 à 10,2 % en 2020) en augmentant le nombre de chaufferies collectives et industrielles utilisant la biomasse, mais aussi le nombre de logements individuels équipés d’appareils de chauffage au bois.

Selon Atlanbois, en 2009, 70 % des énergies renouvelables des Pays de la Loire proviennent de bois énergie, dont seulement 6 % sont issues des installations collectives et industrielles. A l’horizon 2020, la région prévoit de multiplier par 3,5 la quantité d’énergie obtenue à partir de ces installations, tandis que la production liée aux installations individuelles devrait se stabiliser.

Du point de vue des rejets atmosphériques, la combustion de la biomasse est considérée comme étant une énergie limitant la production de Gaz à Effet de Serre (GES). Elle est notamment considérée comme neutre pour ses émissions de CO2. En revanche, les fumées issues de cette combustion comportent de nombreux composés réglementés (NOx, SOx, CO, particules, HAP, dioxines…).

Les particules émises pénètrent dans les voies respiratoires et ont des effets nocifs pour la santé plus ou moins importants selon leur taille. Les particules fines ont été reconnues responsables de cancers du poumon par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) en 2012. Elles ont été classées dans la catégorie des cancérigènes certains par le Centre International des Recherches sur le Cancer (CIRC) en octobre 2013.

Depuis quelques années, des études se sont développées pour mieux appréhender et prévenir l’influence des émissions de combustion de bois énergie sur la qualité de l’air.

Air Pays de la Loire a pris l’initiative en 2013 d’engager une première étude dans les Pays de la Loire cofinancée par la DREAL et a sélectionné trois environnements distincts de la région : une zone de retombées maximales de la chaufferie Biowatts (centrale de cogénération la plus puissante de la région localisée au sud d’Angers), mais aussi une zone suburbaine résidentielle et une zone rurale.

objectif : apprécier la part de biomasse dans les particules

Les objectifs de cette étude portaient sur :

  • la quantification des concentrations en particules issues de la combustion de biomasse dans trois environnements typiques : rural à Saint-Denis d’Anjou (53), suburbain à Angers (49) et dans la zone de retombées maximales de la chaufferie Biowatts à Angers ;
  • l’évaluation de l’influence de la centrale de cogénération Biowatts et des secteurs résidentiels alentours ;
  • la comparaison entre les niveaux relevés dans la région angevine et les niveaux de fond (en milieu rural).

moyens : une campagne comprenant trois stations de mesure

Trois sites de mesure ont été équipés spécialement pour la campagne de mesure d’analyseurs automatiques de particules PM2,5 et PM10 ainsi que de préleveurs de particules atmosphériques. Deux sont localisés à proximité de la centrale Biowatts (Appentis, en zone de retombées maximales, et le laboratoire mobile, en zone résidentielle) et le troisième en milieu rural (Saint-Denis d’Anjou, afin de mesurer les niveaux de fond). Pour compléter ces mesures, la station Appentis a disposé d’un instrument de mesure (Aéthalomètre à sept longueurs d’ondes) permettant d’estimer la part de particules issues de la combustion de biomasse. Les données relevées sur une station mesurant les niveaux de fond urbain de la ville d’Angers (Beaux-Arts) ont par ailleurs été exploitées.

La durée des prélèvements sur filtres (du 17/01/2014 au 29/01/2014, sur les trois sites de mesure) a été écourtée en raison des conditions météorologiques peu favorables à l’accumulation et aux émissions de particules dans l’air. Les particules PM10 et PM2,5 ont été mesurées en continu du 09/01/2014 au 08/04/2014 dans la zone résidentielle d’Angers (remorque), du 01/12/2013 au 23/04/2014 sur le site Appentis, et tout au long de l’année sur les deux autres sites.

Localisation des sites de mesure
Localisation des sites de mesure

résultats : pas d'influence des émissions de la chaufferie sur les teneurs en poussières fines (PM10 et PM2,5) lors de la période d'étude

De décembre 2013 à avril 2014, les conditions météorologiques générales (températures chaudes et vents d’ouest) ont été peu propices à la combustion de biomasse et à l’accumulation de polluants. Toutefois deux épisodes de pollution généralisés ont été enregistrés dans plusieurs régions dont les Pays de la Loire.

Roses de pollution moyennes en PM10 (à gauche) et PM2,5 (à droite) du 8 janvier au 8 avril 2014
Roses de pollution moyennes en PM10 (à gauche) et PM2,5 (à droite) du 8 janvier au 8 avril 2014

Du 8 janvier au 8 avril 2014, hormis l’épisode de pollution de mars 2014, les niveaux relevés en PM2,5 et PM10 sont homogènes en fonction de la direction des vents. Toutefois, les niveaux les plus faibles sont enregistrés par vents de secteur ouest à sud-ouest (vents forts, présence de précipitations favorisant la dispersion et les dépôts de poussières).

Les roses de pollution suggèrent qu’aucune influence des émissions de la chaufferie n’est visible sur les teneurs en PM2,5 et PM10 mesurées dans son environnement.
Les niveaux homogènes relevés par les stations montrent un niveau de fond urbain comparable au niveau de fond rural. Ainsi, ces roses de pollution sont représentatives du niveau de fond régional en PM10 et PM2,5.

résultats : les traceurs de la combustion de biomasse

Les analyses réalisées dans la fraction fine de l’aérosol (PM10) par le Laboratoire de Glaciologie et de Géophysique de l’Environnement auquel Air Pays de la Loire les avaient confiées ont révélé une influence plus marquée de la combustion de biomasse sur les deux sites urbains par rapport au site rural. Ceci, par l’intermédiaire des profils temporels de ses traceurs et indicateurs (lévoglucosan, mannosan, galactosan, OC, EC et K).

Évolution temporelle des concentrations en lévoglucosan entre le 17 et le 29 janvier 2014 (moyennes journalières)
Évolution temporelle des concentrations en lévoglucosan entre le 17 et le 29 janvier 2014 (moyennes journalières)

Les concentrations sont liées aux zones urbaines avoisinantes. L’influence de la chaufferie n’est pas visible sur les teneurs en traceurs issus de la combustion de biomasse. En effet, aucune différence n’est constatée entre les sites localisés respectivement à l’est et à l’ouest. Et ce, quelle que soit la direction du vent.

résultats : pas d'influence des émissions de la chaufferie sur les teneurs en poussières fines issues de la combustion de biomasse (PMwb)

Rose de pollution moyenne en PMwb du 13/12/2013 au 23/04/2014
Rose de pollution moyenne en PMwb du 13/12/2013 au 23/04/2014

Au cours de cette campagne, les concentrations en particules issues de la combustion de biomasse et en particules fines sont faibles. Cependant, les niveaux les plus élevés en PMwb (ne dépassant pas 4 µg/m3) sont enregistrés par vents de sud-est. Ce qui indique une influence probable des zones résidentielles localisées dans cette direction.

La rose ne montre pas d’influence particulière par vent de sud-ouest. Ceci suggère que les émissions de la chaufferie n’ont aucun effet sur les teneurs en PMwb mesurées dans son environnement.

En prenant en compte les épisodes de pollution, les parts de particules issues de la combustion de biomasse varient entre 2 et 51 % des PM10, avec une moyenne de 17%. Ainsi, sur l’ensemble des mois de décembre 2013, et janvier, février, mars 2014, la combustion de biomasse représente une source non négligeable en particules.

résultats : 2 épisodes de pollution généralisés aux caractéristiques différentes

De décembre 2013 à avril 2014, plusieurs régions dont les Pays de la Loire ont connu deux épisodes de pollution aux particules.

En décembre, la chute des températures a entrainé une surconsommation du chauffage domestique et ainsi participé à une augmentation des émissions en particules.

Dans les deux cas, des conditions météorologiques anticycloniques ont persisté pendant plusieurs jours sur la France, favorisant l’accumulation de poussières fines dans l’atmosphère.

Répartition des espèces chimiques majeures lors des 10 plus importants épisodes de pollution par les particules Petit-Quevilly
Répartition des espèces chimiques majeures lors des 10 plus importants épisodes de pollution par les particules Petit-Quevilly
Sources : Airnormand, programme CARA, LCSQA/Ineris
Composition chimique des particules PM2,5 mesurées en périphérie de Paris durant l'épisode de pollution particulaire de mars 2014
Composition chimique des particules PM2,5 mesurées en périphérie de Paris durant l'épisode de pollution particulaire de mars 2014
Source : LSCE

Les profils chimiques mettent en évidence que les épisodes hivernaux sont liés aux combustions de biomasse, trafics et industries, tandis que les épisodes printaniers sont liés aux nitrates et sulfates d’ammonium.

conclusions et perspectives

Sur l’ensemble de la campagne de mesure, les niveaux en particules sont faibles compte tenu des conditions météorologiques favorables à leur dispersion et à leur dépôt. Il y a deux exceptions correspondantes aux pics de pollution particulaire de décembre 2013 et mars 2014.

Dans l’environnement de Biowatts, il n’y a pas d’impact visible des émissions de la chaufferie sur les concentrations en particules issues de la combustion de biomasse, en PM2,5 et en PM10, ni sur les traceurs spécifiques de le combustion de biomasse.

En comparant les niveaux ruraux et urbains, on observe en zone urbaine une influence plus marquée de la combustion de biomasse en provenance du chauffage résidentiel.

Concernant les deux épisodes de pollution particulaire, il s’agit de pollution généralisée sur une partie du territoire français. Les conditions météorologiques anticycloniques ont entraîné en décembre une chute des températures. Ce qui a provoqué une surconsommation du chauffage domestique et ainsi participé à une augmentation des émissions en particules. En mars, ces mêmes conditions ont favorisé l’accumulation de nitrates et sulfates d’ammonium utilisés pour les épandages agricoles.

En 2015, Air Pays de la Loire élargira cette étude relative à l’influence de la combustion de biomasse sur la qualité de l’air, par un suivi de la caractérisation chimique de l’aérosol. Dans ce cadre Air Pays de la Loire intégrera le réseau national CARA (dispositif de surveillance des particules en France, géré par le LCSQA). L’objectif est de disposer sur la façade ouest de la France, d’informations fines sur la composition chimique des particules afin notamment d’estimer les secteurs émetteurs majeurs en cas d’épisode de pollution. De manière générale, Air Pays de la Loire déploiera à compter de 2015 une stratégie de développement de la caractérisation des particules fines, dans un contexte d’impact sanitaire avéré de ces polluants et d’augmentation des situations d’épisodes de pollution particulaires depuis que les seuils ont été rendus plus sévères.

Sur la question spécifique de l’impact de la combustion de biomasse, de nouvelles études pourraient également être menées sur des installations moins puissantes que Biowatts et non soumises à réglementation afin de disposer d’un panel de situations en matière d’émissions de chaufferies.