27/11/2023
- Air extérieur
Depuis 2018 Air Pays de la Loire surveille les niveaux de pesticides dans l’air de la région.
Ce rapport présente les résultats obtenus de juin 2018 à fin décembre 2022.
Un suivi depuis 2018
Dans le cadre de la campagne nationale exploratoire de surveillance des pesticides dans l’air ambiant qui avait pour objectif d’établir le premier état des lieux harmonisé des niveaux de concentration en résidus de pesticides, Air Pays de la Loire a mis en œuvre de juin 2018 à juin 2019, 3 stations de mesure sur les communes de Saint-Julien de Concelles (site à dominante maraîchage-viticulture), de Pouillé (site de grandes cultures) et à Angers au niveau du quartier Monplaisir potentiellement influencé par les traitements arboricoles et viticoles.
Bénéficiant d’un financement quadripartite (DRAAF, DREAL, ARS, Air Pays de la Loire), un prolongement de cette surveillance a été mis en œuvre jusque fin décembre 2021 et complété par l’intégration de deux stations de mesure supplémentaires : sur un site à dominante polyculture-élevage et grandes cultures dans le nord de la région (Marolles-les-Braults) en juillet 2019, et sur un site à dominante viticole (La Chapelle-Heulin) en mai 2020. Compte tenu des niveaux plus faibles enregistrés sur le site de Saint-Julien de Concelles, de sa proximité au site de la Chapelle-Heulin et dans un contexte de restriction budgétaire, la surveillance régionale en 2022 s’est focalisée sur les sites de Pouillé, Marolles-les-Braults et la Chapelle-Heulin. Les mesures sur le site d’Angers ont été poursuivies dans le cadre de la surveillance nationale.
Par ailleurs, dans un contexte d’inquiétude sanitaire lié à la présence de cancers pédiatriques à Sainte-Pazanne, l’ARS et la DREAL des Pays de la Loire se sont rapprochées d’Air Pays de la Loire pour étudier la faisabilité d’un suivi de ces molécules dans l’air sur le territoire de cette commune. En réponse à la demande des services de l’État, Air Pays de la Loire a proposé une évaluation des concentrations atmosphériques de pesticides sur la commune de Sainte-Pazanne selon la même méthodologie que celle mise en œuvre dans le cadre de la surveillance régionale.
76 molécules ont été analysées de façon hebdomadaire selon la stratégie d’échantillonnage proposée par l’Anses1 intégrant des prélèvements plus fréquents en période de traitements agricoles.
L’objectif du suivi régional est double :
- Apporter des éléments d’information (concentrations atmosphériques) aux organismes de santé sur l’exposition par inhalation de la population aux pesticides présents dans l’air ;
- Suivre sur le long terme l’impact des actions régionales de réduction de l’utilisation des phytosanitaires mises en œuvre dans le cadre du plan Ecophyto sur les concentrations enregistrées dans l’air.
Les mesures à Sainte-Pazanne ont pour objectif :
- Obtenir une information sur les niveaux de concentration de pesticides dans l’air en zone habitée de Sainte-Pazanne durant les principales périodes de traitement (printemps et automne pour les traitements herbicides, printemps et été pour les traitements insecticides et fongicides notamment en viticulture) ;
- Mettre en perspective les concentrations mesurées avec celles enregistrées dans le cadre de la surveillance régionale.
Résultat 1 : 48 molécules présentes dans l’air à des fréquences variables
Dans le cadre de la surveillance régionale, sur les 76 substances actives recherchées sur les 4 sites, 48 ont été quantifiées au moins une fois. La fréquence de quantification est très variable d’une substance à l’autre. On peut distinguer des molécules fréquemment détectées (fréquences supérieures à 30 %). Ce sont le lindane, la pendiméthaline, le S-métolachlore, le triallate et le prosulfocarbe. Le lindane a été quantifié dans près de 90 % des échantillons.
Le chlorothalonil, le diflufénicanil, le chlorpyriphos-méthyl, le folpel et le propyzamide ont été quantifiés moins fréquemment (fréquence de quantification comprise entre 10 % et 30 %). Les autres molécules ont été quantifiées dans des proportions inférieures à 10 %.
Globalement une baisse de la fréquence de quantification toutes molécules confondues est constatée. Cette évolution à la baisse concerne principalement les fongicides (folpel, chlorothalonil, tébuconazole, cyprodinil) et le chlorpyriphos-méthyl (insecticide) avec des interdictions (chlorothalonil par exemple) et une pression fongique moins forte ces dernières années. Aucune baisse de la fréquence de quantification, pour les herbicides comme la pendiméthaline, le S-métolachlore, le triallate et le propyzamide n’est observée depuis 2019. Le lindane (molécule interdite depuis 1998) voit également sa fréquence de quantification stable depuis 2019.
À contrario certains herbicides comme le 2.4 D Ester, le diflufénicanil ont vu leur fréquence de quantification augmenter. Ces molécules pourraient être plus fréquemment utilisées en substitution de certaines molécules qui ont vu leur usage réduit. et /ou à l’augmentation des surfaces en culture utilisant ces molécules.
À Sainte-Pazanne, 12 substances actives ont été quantifiées dans l’air. Durant la même période, 29 molécules ont été quantifiées sur au moins un site dédié à la surveillance régionale.
1 https://www.anses.fr/fr/system/files/AIR2014SA0200Ra.pdf
Résultat 2 : des concentrations en herbicides qui augmentent
La concentration moyenne de l’ensemble des pesticides mesurés a augmenté depuis 2019 en lien avec l’augmentation de la concentration annuelle de la molécule majoritaire dans l’air ambiant : le prosulfocarbe (herbicide). Une augmentation des concentrations annuelles pour d’autres herbicides (triallate pendiméthaline) est également constatée. L’augmentation des concentrations en prosulfocarbe (en lien notamment avec l’interdiction de l’isoproturon) et en pendiméthaline enregistrée depuis 4 ans est généralisée sur les sites de grandes cultures. Elle est liée à une utilisation croissante en France de ces deux herbicides depuis une dizaine d’années. À contrario, une baisse continue de la concentration annuelle en S-métolachlore est observée entre 2019 et 2022 (recul sans doute imputable à la pression générée par les problématiques de contamination généralisée de la ressource en eau et des eaux potabilisées).
Au final, pour les 76 molécules étudiées, une augmentation de la proportion des herbicides au détriment des fongicides et insecticides dans l’air est enregistrée depuis 4 ans.
Résultat 3 : des niveaux plus élevés sur les sites de grandes cultures en Pays de la Loire
La mise en perspective des teneurs moyennes enregistrées sur les sites des Pays de la Loire avec celles enregistrées sur des sites de même typologie en France montre :
- Un niveau moyen en prosulfocarbe à Pouillé près de deux fois plus élevé que le niveau moyen de l’ensemble des autres sites de grandes cultures en France ;
- Des concentrations moyennes en pendiméthaline enregistrées sur les sites de Pouillé et de Marolles-les-Braults proches, et 1.5 fois plus élevées que celles enregistrées sur les autres sites ruraux de grandes cultures ;
- Des moyennes en S-métolachlore enregistrées sur les sites de Pouillé et de Marolles-les-Braults respectivement 3.7 et 2.7 fois plus élevées que celles enregistrées sur les autres sites ruraux de grandes cultures ;
- Enfin, un niveau moyen en folpel sur le site viticole de la Chapelle-Heulin proche de celui enregistré sur les autres sites viticoles de France.
À Sainte-Pazanne, la concentration moyenne en pesticides se situe entre celles des sites de La Chapelle-Heulin et d’Angers. La concentration demeure inférieure d’un facteur 5 à celles enregistrées sur les sites de grandes cultures de Marolles-les-Braults et de Pouillé.
Résultat 4 : des concentrations plus élevées à l’automne
Sur l’ensemble des sites, l’évolution temporelle au sein de l’année est comparable, avec les concentrations les plus élevées en pesticides dans l’air en octobre et novembre. Elle est particulièrement visible sur les sites de grandes cultures (Pouillé et Marolles-les-Braults), avec une utilisation d’herbicides pour le désherbage des céréales d’hiver notamment avec du prosulfocarbe. Les fongicides se retrouvent essentiellement au printemps. Cette évolution est conforme à celles observées sur les autres sites de surveillance en France et également visible sur le site de Sainte-Pazanne.
Résultat 5 : focus sur certaines molécules
Le tableau suivant présente de façon synthétique, pour différentes molécules d’intérêt, les niveaux de concentrations (moyenne et maximum sur un mois) ; fréquence de quantification et leur évolution temporelle.
Perspectives
Le suivi continu mis en œuvre depuis 2018 a permis de mettre en évidence notamment des évolutions sur les concentrations annuelles en lien avec les pratiques de traitement et les conditions météorologiques. En 2024, Air Pays de la Loire recommande de relancer le suivi régional sur plusieurs sites qui permet d’une part de fournir des informations sur l’exposition des populations - particulièrement en zones rurales sur des sites qui présentent des concentrations en certaines molécules plus élevées que la moyenne - et d’autre part de consolider les conclusions sur l’influence des actions de réduction d’utilisation des pesticides sur les concentrations dans l’air ambiant.
À Sainte-Pazanne, compte tenu des résultats obtenus (concentration plus faible que sur les sites ruraux dédiés à la surveillance régionale, cohérence dans les molécules détectées et dans leur évolution au sein de l’année par rapport aux mesures effectuées dans le cadre de la surveillance régionale), Air Pays de la Loire ne recommande pas une pérennisation des mesures.