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Investigation de la qualité de l'air de la filière méthanisation, Centrale Biogaz des Terres de Montaigu, 2022

  • Air extérieur

Air Pays de la Loire met en œuvre entre 2021 et 2023 un projet pilote dont l’objet est de suivre la qualité de l’air au niveau de cinq unités de méthanisation des Pays de la Loire. Il étudie les polluants atmosphériques et les odeurs autour de ces unités, selon une approche à l’échelle locale. Ce rapport présente les résultats de l’investigation réalisée de septembre à octobre 2022 au sein et à l’extérieur de la Centrale Biogaz des Terres de Montaigu, localisée en Vendée. 

Contexte : Une étude pilote au niveau de la filière méthanisation

La filière méthanisation en France et dans les Pays de la Loire, en plein essor, se structure fortement, dynamisée par les objectifs nationaux en matière de transition énergétique et par les aides financières. En janvier 2023, à l’échelle régionale, 137 unités sont en fonctionnement et 82 sont en projet (source : AILE1).

L’expansion de la filière suscite néanmoins :

  • Des interrogations d’ordre scientifique notamment concernant la (mé)connaissance des impacts sur l’atmosphère au niveau du digesteur (fuites de méthane) et de l’épandage (émissions de NH3 et de N2O),
  • Dans certains cas, une réserve, des inquiétudes voire de l’hostilité de riverains et de collectifs par rapport à des paramètres plus locaux (odeurs, bruit, risques, préjudices). Cette perception peut être avérée ou supposée.

Dans ce contexte, Air Pays de la Loire met en place une étude pilote dans l’environnement d’unités de méthanisation des Pays de la Loire. Les objectifs visés par cette étude sont multiples :

  • Consolider le socle des connaissances et des expériences sur ce sujet par la mise en place d’une évaluation normalisée,
  • À partir de cette approche, répondre aux questionnements des acteurs de la filière et du grand public et contribuer à objectiver le débat,
  • En fonction des résultats obtenus, fournir des conseils techniques aux exploitants des unités investiguées.

Cette étude est réalisée avec le soutien financier de l’ADEME des Pays de la Loire, de la Région des Pays de la Loire, de GRDF et de GRTgaz et avec la participation de France Nature Environnement Pays de la Loire, de la Chambre d’Agriculture des Pays de la Loire, de l’association AILE et du cluster Méthatlantique.

 

Moyens : des méthodes normalisées et standardisées

La qualité de l’air prise en compte dans le projet d’Etude Pilote d’Investigation de la QUalitÉ de l’air de la Filière Méthanisation (EPIQUE-FM) couvre deux champs d’investigation : d’une part les nuisances olfactives, et d’autre part le suivi des concentrations atmosphériques de 3 indicateurs spécifiques de l’activité de méthanisation : le méthane (CH4), le sulfure d’hydrogène (H2S) et l’ammoniac (NH3), les deux derniers étant également des composés odorants.

Quatre premières unités ont été investiguées dans le cadre de cette étude pilote, AgriBioMéthane2 en Vendée, Derval Agri’Méthane3 en Loire-Atlantique en 2021 ainsi que Rivergaz4 dans le Maine-et-Loire et Fertiwatt5 en Mayenne en 2022. Ce rapport porte sur la cinquième et dernière unité, la Centrale Biogaz des Terres de Montaigu, en Vendée. Cette unité utilise les substrats liés à l’activité agro-industrielle de la communauté de communes d’une part, et propose une solution de valorisation des matières organiques diffuses. L’unité fédère un groupe de 24 exploitations agricoles du territoire en polyculture-élevage, avec une majorité d’élevages bovins et quelques élevages porcins.

 

Vue aérienne de la Centrale Biogaz des Terres de Montaigu
Vue aérienne de la Centrale Biogaz des Terres de Montaigu

 

Pour déterminer l’influence odorante du site, la méthode du Langage des Nez® a été utilisée lors de deux journées d’investigation, les 4 et 5 octobre 2022. Il s’agit d’une méthode standardisée de suivi olfactif reposant sur une structuration de l’espace odorant et l’utilisation d’une collection organisée de référents odorants objectifs. Les résultats obtenus correspondent à des investigations ponctuelles, cependant l’unité était en fonctionnement nominal et les intrants réceptionnés ces deux journées correspondent aux types largement majoritaires de l’unité.

Pour le suivi des concentrations atmosphériques, Air Pays de la Loire a installé à Montaigu-Vendée, au niveau d’une des habitations les plus proches de l’unité (1 200 mètres à l’ouest), un laboratoire mobile équipé d’analyseurs automatiques pour le sulfure d’hydrogène (H2S) et le méthane (CH4) entre le 9 septembre et le 12 octobre 2022. Les niveaux moyens d’ammoniac (NH3), quant à eux, sont évalués au niveau de quatre sites, entre le 20 septembre et le 5 octobre 2022.

 

Localisation du laboratoire mobile et des sites autour de la Centrale Biogaz des Terres de Montaigu
Localisation du laboratoire mobile et des sites autour de la Centrale Biogaz des Terres de Montaigu

 

Résultats : l’empreinte du site dans son environnement

Suivi olfactif

Observations à l’intérieur du site

La carte ci-dessous présente l’intensité maximale relevée pour les 22 points d’olfaction à l’intérieur de l’unité de méthanisation toutes notes odorantes confondues.

Points d’olfaction à l’intérieur de la Centrale Biogaz des Terres de Montaigu et intensités maximales ressenties
Points d’olfaction à l’intérieur de la Centrale Biogaz des Terres de Montaigu et intensités maximales ressenties

 

Six notes odorantes ont été principalement mises en évidence à l’intérieur du site : les notes aminées, les notes soufrées, la géosmine, l’acide volatil, le scatol et l’acétyl pyrazine. Une majorité de ces notes sont liées à des phénomènes de fermentation et de dégradations organiques cohérents avec l’activité de méthanisation.

Lors des deux journées d’investigation, l’intensité maximale relevée au sein de l’unité est de 4, correspondant à un qualificatif « moyen ». Aucun niveau d’intensité forte n’a été perçu (intensités 6 ou 7).

Les différentes zones de réception et de stockage des intrants constituent logiquement les zones les plus odorantes de l’unité, en particulier, la cuve à boues, la cuve à lisier et, à l’intérieur du bâtiment de réception fermé et en dépression, les secteurs de stockage de matière solide ainsi que la trémie.

Le bio-filtre permet d’éliminer ou de réduire les intensités des notes odorantes principales.

Les secteurs près des digesteurs sont peu odorants et font ressortir des notes soufrées attribuées à l’hydrogène sulfuré présent dans le mélange avant épuration. On retrouve ces notes soufrées au niveau des zones de digestat liquide et solide (probablement sous l’influence des digesteurs).

Des notes soufrées sont également observées au niveau du poste d’épuration (en lien avec le process de traitement de l’air et/ou la proximité des digesteurs) ainsi qu’au niveau du poste d’injection (à relier probablement avec l’odorisation du gaz avant injection).

 

Observations à l’extérieur du site

La carte ci-dessous représente les 19 points d’olfaction relevés à l’extérieur de l’unité de méthanisation les 4 et 5 octobre 2022. Leur localisation a été choisie de façon à quadriller l’environnement immédiat de l’unité ainsi que les secteurs sous les vents, notamment habités, au nord et au nord-est de l’unité. Au niveau des points gris, aucune odeur n’a été perçue.

 

Points d’olfaction dans l’environnement de la Centrale Biogaz des Terres de Montaigu les 28 juin et 26 juillet 2022
Points d’olfaction dans l’environnement de la Centrale Biogaz des Terres de Montaigu les 28 juin et 26 juillet 2022

 

L’emprise odorante de l’unité de méthanisation dans son environnement est limitée puisque les points d’olfaction extérieurs associés à l’activité de la Centrale Biogaz des Terres de Montaigu sont localisés à moins de 160 mètres, avec des intensités de 1 à 5. Les deux notes les plus perçues sont le scatol et l’acide volatil, notes odorantes majoritaires à l’intérieur de l’unité.

Au niveau des premières habitations localisées à environ 800 m au nord et au nord-est (lieux-dits La Huberdière et la Mongie), aucune odeur provenant de l’unité n’a été détectée.

 

Suivi des concentrations dans l’air

Les principaux enseignements de cette campagne sont :

  • La concentration moyenne en méthane est de 1 386 µg/m3, cohérente avec le niveau de fond mondial, et des élévations atteignant au maximum 2 345 µg/m3 ont été observées la nuit en lien avec des conditions atmosphériques défavorables à la dispersion des espèces chimiques. Elles ne sont pas attribuées à l’activité de la Centrale Biogaz des Terres de Montaigu car quelle que soit la direction des vents, les niveaux en méthane sont homogènes,
  • Les niveaux en sulfure d’hydrogène ont dépassé le seuil olfactif, fixé à 7µg/m3, moyenne 30 minutes, le 30 septembre par vent de sud-ouest et le 12 octobre par vent de nord-est, directions qui excluent une origine en provenance de la Centrale Biogaz des Terres de Montaigu. Ces dépassements sont attribués à l’environnement agricole général. La valeur journalière maximale (1,9 µg/m3) correspond à 1,3 % de la valeur guide sanitaire de l’OMS fixée à 150 µg/m3,
  • Les niveaux les plus élevés en ammoniac sont observés au niveau de la première habitation (lieu-dit La Fouctière) et sont attribués à des épandages d’effluents entre le 28 septembre et le 5 octobre. Hormis cet évènement, les concentrations en limite de propriété de l’unité sont légèrement plus élevés que sur les autres sites. La valeur maximale mesurée (23 µg/m3) correspond à 5 % de la Valeur Toxicologique de référence de 500 µg/m3.

 

Conclusions et perspectives : une portée des odeurs inférieure à 160 mètres

Les secteurs les plus émetteurs d’odeurs à l’intérieur du site de la Centrale Biogaz des Terres de Montaigu sont ceux recevant ou traitant les intrants. Néanmoins, les intensités les plus élevées relevées les deux journées d’investigation ne dépassent pas la valeur de 4 (qualificatif « moyen »).

L’analyse olfactive a permis de retrouver plusieurs notes caractéristiques de la méthanisation identifiées lors des investigations menées sur les quatre premières unités : l’acide volatil, le scatol et les notes aminées. Ces études permettent de confirmer le référentiel méthanisation du Langage des Nez®.

L’emprise odorante de l’unité de méthanisation dans son environnement est limitée puisque les points d’olfaction extérieurs associés à l’activité du site sont localisés à moins de 160 mètres.

Les concentrations des indicateurs dans l’air mesurées ne montrent pas d’influence de la Centrale Biogaz des Terres de Montaigu sur les niveaux extérieurs de méthane et d’hydrogène sulfuré. Pour les niveaux d’ammoniac, une influence directe est mise en évidence en limite de propriété mais pas au-delà. Les seuils sanitaires de référence sont respectés.

 

  1. https://aile.asso.fr/biogaz/la-filiere/carte-chiffres-cles-methanisation/ 
  2. https://www.airpl.org/rapport/investigation-de-la-qualite-de-l-air-de-la-filiere-methanisation-agribiomethane-2021
  3. https://www.airpl.org/rapport/investigation-de-la-qualite-de-l-air-de-la-filiere-methanisation-derval-agri-methane-2021
  4. https://www.airpl.org/rapport/investigation-de-la-qualite-de-l-air-de-la-filiere-methanisation-rivergaz-2022
  5. https://www.airpl.org/rapport/investigation-de-la-qualite-de-l-air-de-la-filiere-methanisation-fertiwatt-2022