07/07/2023
- Air extérieur
En complément de la surveillance effectuée dans l’environnement de la raffinerie de Donges, Air Pays de la Loire a souhaité réaliser un diagnostic des niveaux de Composés Organiques Volatils (COV) dans l’air sur le territoire de la Basse-Loire.
Ce rapport présente les résultats issus de 8 semaines de mesure en 2022 et 2023.
Contexte
La Communauté d’Agglomération de la Région Nazairienne et de l’Estuaire (CARENE) présente sur son territoire de nombreux établissements industriels émetteurs de Composés Organiques Volatils (COV). Le secteur industriel au sens large représente près de 80 % des émissions totales de COV de la CARENE (source : BASEMIS, Air Pays de la Loire).
En termes de surveillance de COV dans l’air, Air Pays de la Loire réalise, chaque année, une campagne de mesure du benzène dans l’environnement de la raffinerie TotalEnergies à Donges depuis 2005. Ce suivi de la qualité de l’air a été renforcé par la mesure des COV totaux (COV dans leur globalité dans distinction de substances) à partir de 20211.
En complément de cette surveillance focalisée à l’environnement de la raffinerie, Air Pays de la Loire a souhaité étendre le diagnostic des niveaux de COV par la mise en œuvre d’une pré-étude de mesures de COV dans l’air élargie au territoire de Basse-Loire.
Un double objectif
Cette pré-étude a pour objectif de :
- Quantifier les concentrations en COV d’intérêt sanitaire dans l’air ambiant au niveau de zones habitées de Basse-Loire avec une double approche permettant d’appréhender la pollution moyenne et la pollution ponctuelle.
- Apporter des éléments d’information sur le dimensionnement d’un éventuel dispositif de surveillance de COV dans le cadre de l’étude de zone mise en œuvre sur le territoire de la CARENE.
Moyens de mesure
14 Composés Organiques Volatils étudiés
Cette étude se focalise sur les COV d’intérêt sanitaire. Le choix des molécules à prendre en compte est réalisé selon 3 étapes :
- Prise en compte des COV réglementés dans l’air ambiant, des COV d’intérêt selon l’ANSES, des COV présentant une valeur guide de l’Organisation Mondiale de la Santé ou pour lesquels une réactualisation /intégration de valeurs guides est nécessaire,
- Prise en compte de certains COV émis dans la zone,
- Étude de la faisabilité de collecte et d’analyse pour chaque molécule.
Au final 14 COV (benzène ; 1-3 Butadiène ; 1,1,2 trichloroéthane ; trichloroéthylène ; naphtalène ;
1,2 dichloroéthane ; dichlorométhane ; styrène ; tétrachloroéthylène ; toluène ; éthylbenzène ; o -xylène ; m-p xylènes Hexane) ont été collectés, analysés en laboratoire, avant de faire l’objet d’une analyse scientifique qui fait l’objet du présent rapport.
Des mesures par tubes à diffusion passive pour appréhender la pollution moyenne
Les niveaux moyens en COV sont évalués par tubes à diffusion passive. 8 semaines de mesure ont été réalisées entre juin 2022 et mars 2023. Des mesures ont ainsi été effectuées durant la dernière quinzaine de juin 2022, mi-septembre 2022, la dernière quinzaine de novembre 2022 et fin février - début mars 2023 pour appréhender des conditions météorologiques contrastées.
8 sites de mesure localisés en zones habitées et à proximité des principaux émetteurs de COV (sites industriels déclarés et principales routes) ont été instrumentés. Pour comparaison, deux sites de référence ont également été instrumentés, l’un en zone rurale à Saint-Joachim et le second en zone urbaine dans le centre-ville de Nantes au niveau du cimetière de la Bouteillerie.
Des mesures par canisters pour évaluer la pollution ponctuelle
Les niveaux ponctuels en COV sont évalués à l’aide de canisters. Les résultats obtenus correspondent à des concentrations moyennes sur 30 minutes (temps de remplissage du canister).
Deux mesures par canisters ont été effectuées simultanément au niveau du square Delzieux à Saint-Nazaire le 30 novembre puis deux autres en simultané le 9 décembre 2022. À ces dates, les prévisions météorologiques prévoyaient des vents de nord-est qui plaçaient le site de mesure sous les principaux émetteurs de COV. Deux mesures au niveau du site de référence à Saint-Joachim ont également été effectuées lors de ces deux journées pour comparaison.
Résultats
Parmi les 14 COV étudiés, le 1,1,2-trichloroethane, le trichloroéthylène et le dichlorométhane présentent des concentrations inférieures aux limites de quantifications analytiques sur l’ensemble des sites.
Les concentrations en naphtalène, tétrachloroéthylène, 1,2 dichloroéthane sont proches des limites de quantification pour l’ensemble des sites de mesure.
Les concentrations en 1-3 butadiène restent homogènes sur l’ensemble des sites ce qui suggère une absence d’influence particulière d’émetteurs.
La concentration moyenne en benzène est homogène (comprise entre 0.6 µg/m3 et 0.8 µg/m3) sur la plupart des sites, hormis sur les 2 sites de Donges où la concentration moyenne (1.12 µg/m3) est 56 % plus élevée que sur les autres sites. Une influence des zones de stockage ouest de la raffinerie de Donges a pu être mise en évidence sur les concentrations en benzène sur ces deux sites par vents de sud-ouest. Cette influence se caractérise également par la présence de composés tels que le pentane 2-methyl, le pentane, le cyclohexane méthyl, l’hexane, l’octane et l’heptane en concentrations plus élevées sur les sites 7 et 8 par rapport aux autres sites.
Les concentrations les plus élevées en hexane, styrène, toluène, éthylbenzène enregistrées du 30 novembre au 9 décembre 2022 au niveau du cimetière rue du plessis à Donges par vent de nord-est pourraient être liées à une activité proche du site (présence de ravalement au niveau des bâtiments situés à une centaine de mètre).
La mise en perspective des concentrations obtenues sur les 8 semaines de mesure par rapport aux valeurs réglementaires, aux valeurs guides OMS et aux VTR de l’ANSES définies pour des expositions de la population générale chroniques ou sub-chroniques par inhalation montre :
- Des niveaux en benzène inférieurs à l’objectif de qualité et à fortiori à la valeur limite,
- La valeur repère fixée au Royaume-Uni pour le 1.3 butadiène a également été respectée,
- Hormis pour le benzène, où la VTR de l’ANSES a été dépassée sur l’ensemble des sites, les autres substances présentent des concentrations inférieures aux VTR de l’ANSES,
Cependant, de façon plus globale, les niveaux en benzène enregistrés durant cette étude sont en cohérence avec les moyennes annuelles enregistrées depuis 2010 sur le site de trafic du boulevard Victor Hugo à Nantes qui sont comprises entre 0.6 µg/m3 et 1 µg/m3. Le dépassement des VTR définies par l’ANSES n’est alors pas spécifique à cette étude.
Enfin, les mesures par canisters effectuées le 30 novembre au niveau du square Delzieux à Saint-Nazaire montrent une possible influence des émissions de Cargill sur les concentrations en hexane (solvant utilisé dans le process de l’établissement). L’influence des émissions des autres émetteurs de COV situés dans la zone (Man Diesel & Turbo ; STX Europe, AEROLIA, Sides) par vents de nord-est [30°N – 60°N] n’a pas pu être appréciée.
Perspectives
Cette pré-étude a permis d’obtenir des premières informations sur les niveaux de plusieurs COV sur l’ensemble du territoire de Basse-Loire. Ces résultats pourront être utilisés pour le dimensionnement de la phase de mesure de l’étude de zone mise en œuvre sur la CARENE. Des nouvelles mesures pourraient par exemple être effectuées à différentes saisons à l’aide d’analyseurs automatiques afin de mieux cerner l’influence de certains émetteurs de la zone.
Pour évaluer la pollution chronique et le respect strict des valeurs réglementaires notamment, il parait important de pérenniser un suivi du benzène en particulier dans l’environnement de la raffinerie de Donges. Ce suivi pourrait se concrétiser par la mise en place de mesures automatiques dans le centre-ville de Donges sous les vents de la raffinerie par vents de sud-ouest (vents majoritaires dans la zone) où les niveaux de benzène les plus élevés ont été enregistrés.